Les principaux vecteurs de l’e-reputation

Sans prétendre établir une typologie exhaustive, il importe de distinguer les principaux supports qui constituent les vecteurs essentiels de l’e-réputation. Les répliques n’étant pas forcément les mêmes selon les vecteurs, cet essai de typologie est utile dans le cadre de nos missions professionnelles.

Lorsqu’on s’intéresse aux questions d’e-réputation, il est indispensable de prendre en compte certaines difficultés liées à la nature même du Web. En effet, une mission d’intervention sur l’e-réputation d’un client peut s’avérer rapidement périlleuse étant entendu qu’il faut faire face à la fois à une grande diversité de supports – qui sont par ailleurs de plus en plus interconnectés entre eux –, à un volume d’informations en augmentation constante et à des internautes qui sont tous les relais potentiels d’une information qui peut être positive mais aussi négative.

Sans prétendre établir une typologie exhaustive, il importe de distinguer les principaux supports qui constituent les vecteurs essentiels de l’e-réputation. Les répliques n’étant pas forcément les mêmes selon les vecteurs, cet essai de typologie est utile dans le cadre de nos missions professionnelles.

 

Les sites institutionnels

Par définition, le site d’une institution telle qu’un ministère, une collectivité locale ou encore un organisme de recherche inspire confiance. En fonction de son domaine d’activité, et pour soigner son e-réputation, il est toujours bon d’être référencé sur un site institutionnel. Cela permet de crédibiliser fortement son savoir-faire tout en favorisant une meilleure visibilité sur les moteurs de recherche comme Google qui mettent l’accent sur la qualité des liens entrants pour déterminer la pertinence et la popularité d’un site web.
Mais un site institutionnel peut également commettre des erreurs qui ne sont pas sans conséquences pour certains professionnels. L’information étant considérée comme officielle, donc vraie, celle-ci peut alors être reprise très rapidement par une multitude de supports. Dans ce cas, il est nécessaire de réussir à trouver rapidement le bon interlocuteur – au sein de structures parfois lourdes et peu communicantes – et de disposer d’un argumentaire juridique solide. L’objectif reste de faire supprimer l’information litigieuse au plus vite, avant que celle-ci ne soit se répande comme une traînée de poudre. Il faudra malgré tout entreprendre ensuite des démarches en direction des supports qui se sont fait le relais de l’information. Mais celle-ci seront grandement simplifiées si l’on peut établir que le site source officiel a supprimé l’information litigieuse, sauf à tomber sur un responsable récalcitrant.

 

Les sites des grands médias

Les sites de la grande presse – télé, radio, presse écrite – disposent d’une bonne visibilité sur le réseau. Il vaut donc mieux bénéficier d’un bon traitement, d’une « bonne feuille » écrite par un journaliste travaillant dans ces médias. Dans le cas contraire, il peut s’avérer difficile de faire retirer une information qui nuit à l’image d’une personne ou d’une entreprise, pour des raisons de volonté d’indépendance de la presse, ou des raisons juridiques. À défaut, il faut essayer de contrebalancer cet article par des contributions positives afin de faire disparaître l’article des premières pages de résultats des moteurs. Cette politique de noyade peut s’avérer efficace mais rien n’est jamais définitif et l’article en question peut toujours réapparaître plus tard à la faveur d’une actualité.
L’idéal reste tout de même d’obtenir la suppression de l’information du site web. Nous avons ainsi été amenés à traiter d’un problème d’e-réputation avec un grand média radiophonique dont l’un des sites diffusait une information négative sur un client. Après certaines démarches quelque peu fastidieuses, le contact a été établi avec la responsable du service juridique de cette radio qui a ensuite fait le lien avec le service technique pour prendre toutes les mesures nécessaires. Mais là encore, cela demande de la patience, de la diplomatie et une bonne dose de compétences en matière juridique.

 

Les forums et listes de discussion

Les forums et listes de discussion apparaissent comme des vecteurs importants de l’e-réputation. Dans le cadre d’une liste de discussion professionnelle, il est toujours intéressant d’apparaître comme un référent et donc de jouir d’une bonne image dans son domaine d’activité. Mais les listes peuvent parfois constituer un piège pour certains professionnels qui se montrent trop bavards et, commettant certaines erreurs d’appréciation, risquent de perdre de leur crédibilité auprès de leurs pairs.
Quant aux forums de discussion, ceux-ci peuvent s’avérer stratégiques surtout quand ces derniers bénéficient d’une bonne visibilité dans les moteurs de recherche. Nous avons ainsi souvent eu affaire à des problèmes dus à des contributions d’internautes postées dans des forums financiers et qui mettaient en cause le sérieux d’une entreprise. Il importe d’agir vite afin que ces contributions ne restent pas trop longtemps sur la première page de résultats d’un moteur comme Google…

 

Les Blogs

Certains blogs peuvent aujourd’hui jouir d’une très grande notoriété jusqu’à rivaliser avec certains grands médias qui, de plus en plus, reprennent des informations en provenance de la blogosphère. Des articles publiés sur des blogs très lus peuvent avoir des conséquences sur l’image – et les finances – d’une entreprise. L’affaire Engadget/Apple qui s’est déroulée au mois de mai 2007 en est un exemple. Il a suffi que le site Engadget annonce un retard pour l’iPhone et pour la prochaine version du système d’exploitation MacOS pour que, quelques minutes plus tard, le cours de l’action Apple chute de 107,89 à 104,63 dollars. L’information étant finalement fausse, Engadget rectifie le tir dans la journée mais le cours de l’action ne retrouvera jamais sa valeur d’ouverture.

 

Les Wikis

Les Wikis sont des plateformes collaboratives très prisées par les internautes. Le plus connu reste l’encyclopédie gratuite Wikipédia qui reste le 10ème site internet le plus fréquenté au monde et le lieu où se mène une véritable guerre de l’information.
On sait aussi que certaines sociétés n’hésitent pas à agir directement sur leurs fiches pour éliminer ce qui ne les satisfait pas. On peut aussi citer, pour exemple, l’équipe du cabinet du Premier ministre australien qui a été accusée de soigner son image sur Wikipedia en supprimant des informations susceptibles de porter atteinte à l’image du gouvernement.
Prenant conscience de ce type d’abus, Virgil Griffith, un étudiant américain en informatique, a eu l’idée de mettre au point un outil permettant de tracer les personnes ou organismes qui écrivent et/ou modifient des articles dans Wikipedia. Son site nommé WikiScanner identifie ainsi l’auteur d’une contribution grâce à son adresse IP. Ce qui lui a permis de découvrir la présence de contributeurs très actifs de l’encyclopédie en ligne tels que l’église de Scientologie, le Vatican ou encore la CIA.

 

Les Réseaux sociaux

Les réseaux sociaux font partie des applications emblématiques du Web 2.0. Les internautes peuvent se retrouver en fonction de leurs affinités sur une grande variété de plateformes qui leur proposent des outils et services propices au partage et à l’échange d’informations. Les réseaux sociaux peuvent alors se transformer en puissant outil de lobbying en fonction de circonstances particulières. Fin juin 2007, la banque HSBC décide subitement de suspendre une offre spéciale dédiée aux étudiants britanniques. Ces derniers devront alors finalement payer des intérêts de près de 10% sur leur emprunt alors que l’offre initiale ne prévoyait aucun frais de ce type jusqu’à trois ans après la fin de leurs études universitaires. La réponse des étudiants ne se fait pas attendre. Regroupés au sein du réseau social Facebook, ils engagent un bras de fer avec la banque : commentaires assassins, appels au boycott… les groupes Facebook réussissent à fédérer rapidement plus de 4500 étudiants et cela en plein été. Devant l’ampleur de la mobilisation, la banque HSBC fait machine arrière pour tenter de limiter les dégâts de sa e-réputation.

 

Les plateformes de vidéos ou de photos

Les plateformes de partage de vidéos comme YouTube ou Dailymotion apparaissent également comme de puissants vecteurs de l’e-réputation. Certaines entreprises parviennent ainsi à soigner leur image grâce à une bonne politique de communication qui parvient à séduire les internautes. Ces derniers peuvent alors se transformer en ambassadeurs d’une marque en dupliquant un clip de campagne publicitaire qui sera ensuite posté, et donc visualisé, sur diverses plateformes vidéo. Mais ce système peut également s’avérer destructeur pour une entreprise. L’on pense alors à la société Kryptonite qui a dû faire face à une vidéo montrant l’ouverture facile de son antivol pour 2 roues grâce à un simple stylo. Cette vidéo aurait été téléchargée plus de 250 000 fois en 3 jours, et plus de 2 millions en 10 jours… Résultat : les ventes de la société ont subi une chute sévère.

 

Les agrégateurs d’actualités

En combinant des technologies d’agrégation et d’analyse, les services d’actualité offrent une véritable revue de presse en ligne, mise à jour en continu. Les sources d’informations exploitées par ces outils varient selon les services, des dépêches d’agences aux nouvelles issues de la presse écrite et de la presse électronique, des blogs, sans oublier la TV et la radio.
Parmi les principaux agrégateurs d’actualités, l’on trouve Google News et sa versions francophone Google Actualités ou encore l’agrégateur français Wikio. Ce dernier a adopté une démarche plus collaborative que son concurrent en proposant aux internautes de poster leurs propres articles mais aussi de noter et de commenter les articles de la grande presse et des blogs référencés sur la plateforme.
Étant donné que l’internaute peut cibler ses recherches comme sur un moteur de recherche, il est possible de faire apparaître sur ces plateformes toute l’actualité et donc toute l’e-réputation actuelle autour d’une personne, d’une marque ou d’une entreprise en quelques clics. Elles sont donc de redoutables outils pour concentrer l’e-réputation, mais aussi d’excellents outils de suivi d’image.

 

Les libres commentaires sur les sites communautaires

L’une des caractéristiques essentielles du Web 2.0 reste la possibilité offerte aux internautes de réagir et de commenter les contenus postés sur les diverses plateformes : blogs, agrégateurs d’actualités, sites de partage de vidéos et de photos… autant de services qui peuvent, à tout moment, mettre à l’épreuve une e-réputation.
Dans une polémique qui opposa en 2005 un blogueur américain très influent (Jeff Favis du blog BuzzMachine) à la société Dell, cette dernière a dû faire face à une réaction importante de la part des internautes. Ainsi, sur les divers billets écrits sur cette affaire, ce sont plusieurs milliers de commentaires qui ont été postés, plus de 650 sur le billet retranscrivant la lettre ouverte au PDG de Dell. Autant dire que la société informatique, devant l’ampleur du phénomène, a été obligée de travailler à une nouvelle politique de communication pour tenter de rectifier le tir et améliorer son e-réputation.

Gabriel Szapiro

Le digital révolutionne les modes de communication, l'information et, en conséquence, le marketing. Conscient de cette révolution, j'ai depuis deux ans mis en oeuvre pour nos clients des stratégies d'Inbound Marketing, reposant sur quatre cultures : l'innovation, l'obsession-client, la différence et le brand content. Chargé de conférence à HEC et à l'ESSEC ainsi que dans d'autres écoles de commerce en France et à l'étranger, je me suis engagé à promouvoir l'Inbound Marketing à l'aide de mon récent livre : "l'Inbound Marketing selon la Stratégie du Sherpa", édité chez Jacques Marie Laffont éditeur.