2015
17/Août

La data dans l’industrie musicale

Tout le monde le sait désormais, chacune de nos actions sur Internet (et même au-delà), génère des informations, des données. Nous sommes définis par les sites que nous visitons, les produits que nous achetons, les vidéos que nous regardons, les contenus que nous aimons et partageons mais aussi … la musique que nous écoutons.

Écouter de la musique est en soi un acte tellement quotidien qu’il en devient presque banal : ce loisir nous accompagne dans les transports, au travail même, lorsque nous faisons du sport, cuisinons, nous douchons, et tout simplement lorsque nous souhaitons nous détendre. A l’heure où l’industrie musicale ne parvient toujours pas à sortir la tête de l’eau, nous n’avons pourtant jamais écouté autant de musique.

L’arrivée du streaming

De la K7, au CD, en passant par le MP3, la musique a expérimenté tous les formats possibles pour se faire entendre. Mais elle ne parvenait toujours pas à répondre à une problématique centrale : Proposer une offre large et renouvelable, à bas coût.

Nos artistes préférés étaient ainsi victimes de téléchargements illégaux, fragilisant un peu plus leur industrie déjà fortement malmenée. On doit à la dématérialisation ce compromis qui a permis de convaincre les mélomanes de cesser le téléchargement au profit d’un accès en ligne à leur bibliothèque musicale : le streaming.

En France, c’est plus de 2 millions de personnes qui sont abonnées aux plateformes telles que Deezer, Spotify, Last.fm. En un an, ce mode de consommation a augmenté de 35 % en France, permettant ainsi aux revenus de musique de streaming de dépasser ceux des téléchargements. Le streaming, un véritable relais de croissance pour l’industrie musicale.

Exit le téléchargement : désormais de nombreuses plateformes proposent l’accès à un large catalogue musical de façon gratuite ou à prix abordable.

L’offre est renouvelée en permanence, en fonction de l’actualité musicale des artistes.

Mieux, nul besoin de transférer vos morceaux, ils se synchronisent directement sur votre téléphone.  Mais jusqu’ici on ne vous apprend rien.

 

Comment utiliser ces données ?

Le streaming est un marché étroit sur lequel de nombreux acteurs se sont engouffrés : Spotify, Deezer, Last.fm, Grooveshark, et dernièrement Apple Music … Face à une offre relativement dense, l’enjeu est, une fois de plus, de se démarquer. Comment ? En proposant le service complémentaire qui vous placera dans le coeur des utilisateurs.

Comme tout consommateur, le mélomane a des attentes précises. Il est satisfait bien sûr d’écouter sa musique à tout moment, mais ce n’est pas tout. Il est avide de découvrir de nouvelles chansons avant tout le monde, et surtout d’enrichir ses collections musicales en fonction de ses goûts.

Partant de ce constat, les plateformes ont dans un premier temps proposé à leurs utilisateurs, des playlists de chansons reposant sur des ambiances, des styles musicaux, ou proposant tout simplement une mise en lumière des nouveautés de la semaine.

Mais ces fonctionnalités se sont très vite essoufflées. Le consommateur recherche des services plus personnalisés : il attend que l’entité qui héberge tous ses titres favoris, lui corresponde et puisse ainsi prédire ce qu’il a envie d’écouter lorsque lui-même n’en a pas conscience.

Or, il se trouve que nous laissons une quantité de données en nous adonnant à notre loisir préféré. Si si, des quantités on vous dit ! Des artistes que vous écoutez, au titre de votre chanson préférée, en passant par le nombre de lectures, la diversité des titres ainsi que la fréquence d’écoutes et le contenu de vos commentaires … chacun de ces éléments représente des données, qui permettent de dresser un portrait complet de votre personnalité et de vos goûts.

L’entreprise Next Big Sound est une des spécialistes qui analysent ce type de données pour le compte de sociétés. Pour ce faire, elle récupère des informations provenant de différentes sources : des plateformes musicales (Youtube, Spotify) mais aussi directement des médias sociaux.

Music Metric, quant à lui, collecte et analyse les données liées à l’univers de la musique en ligne. Cette entreprise scrute les tendances sur les réseaux sociaux pour les synthétiser dans un tableau de bord, connectable à la fois à Google Analytics et à Facebook Insights. Elle se base sur des critères variés, du style de musique à la popularité d’un artiste sur les réseaux sociaux, en passant par les lieux où un artiste s’est produit, pour fournir une analyse riche et précise. Elle est désormais la propriété d’Apple.

On parle donc bien ici de Big Data ! Et pour cause, ces analyses reposent sur de puissants algorithmes, capables d’agréger un ensemble de données et d’en traduire des similitudes entre plusieurs morceaux, mais aussi des typologies d’utilisateurs caractérisés par leurs goûts et leurs comportements. En corrélant les écoutes avec les ressentis diffusés sur les réseaux sociaux, elles sont également capables d’évaluer notre réceptivité aux tendances du moment. En d’autres termes, à partir de nos écoutes, ces entités ont les moyens d’anticiper nos actions et de nous recommander du contenu en conséquence.

 

Etude de cas : Spotify 100% Data

Spotify est une plateforme qui repose entièrement sur la Data ; c’est à dire que l’utilisation des données se fait à différents niveaux de son organisation. Elle s’en sert à la fois pour recommander et classer ses playlists, mais également pour cibler ses publicités, qui assurent sa rentabilité.

La plateforme suédoise s’est donc très vite orientée vers la personnalisation de son offre grâce à un partenariat avec Microsoft et The Echo Nest, éditeur d’analyses de données musicales. Partenariat qui donna naissance aux prémices des playlists personnalisées que nous connaissons actuellement : MixShape. Cette plateforme était capable de convertir des chansons en différentes formes, selon les ambiances communes qui s’en dégagent.

De là, les titres sont ensuite classés par couleurs selon une palette limitée. Les formes et les couleurs sont alors mélangées pour correspondre à un tempo et un volume. A ce stade, chaque morceau possède une signature visuelle unique. Cette analyse permettait de redistribuer les titres de votre playlist Spotify en 4 grandes catégories “Romance”, “Party”, “Exercise”, et “Work” ; celles-ci menant par la suite à des choix “d’occasion” d’écoute plus spécifiques, qui modulaient ainsi la forme de votre playlist.

Une traduction de la musique en données qui a propulsé Spotify dans une personnalisation de ses services de plus en plus pointue.

En 2014, Spotify décide donc de racheter The Echo Nest, qui fournit nombre de ses concurrents. Cette solution propose une série d’API basées sur des métadonnées enrichies permettant de fournir aux utilisateurs des recommandations personnalisées de titres musicaux, mais aussi une segmentation des audiences, utile pour cibler la publicité en fonction du type de musique écouté. Ce sont donc des algorithmes basés sur l’intelligence artificielle que The Echo Nest est capable de mettre en place pour identifier les chansons ou remix, et ainsi mieux comprendre les habitudes et les goûts des utilisateurs.

Grâce à ce puissant moteur de recommandations, Spotify élève la qualité de ses services : sur la homepage de l’application vous est proposée une série de playlists associées au moment de la journée correspondant à votre connexion, mais également liées à l’humeur que vous pourriez ressentir.

A la fin de l’année, Spotify, à l’instar de nombreux réseaux sociaux tels que facebook ou Google +, a offert à ses utilisateur un récapitulatif de leur année en chanson, basée sur les titres les plus écoutés, et qui donc ont marqué leur année.

Mais les possibilités de Spotify ne s’arrêtent pas la. Il est également capable de vous faire découvrir des artistes et des morceaux susceptibles de vous plaire, grâce à la fonction “Découvrir” basée sur vos playlists les artistes que vous suivez. Celle-ci a amorcé une nouvelle fonctionnalité : la plateforme propose désormais à ses utilisateurs un sélection de titres choisis expressément pour vous, et renouvelée tous les lundis. Ils proviennent d’un data-mining poussé, alliant à la fois Homme et intelligence artificielle, qui permet à l’application de proposer du contenu correspondant parfaitement au profil ciblé. Cette fonctionnalité incite également les utilisateurs à enregistrer les morceaux qu’ils aiment, de façon à valider la véracité des algorithmes et donc le choix de Spotify. De cette façon, les recommandations tendront à être de plus en plus précises au fil des écoutes. Cette fonctionnalité rappelle, certes, “For You” d’Apple Music, qui souffre néanmoins d’une absence de pertinence de ses premières recommandations et n’incite donc pas toujours l’utilisateur à renouveler son utilisation.

Déjà utilisatrice d’outils nécessaires à l’analyse de données, (Cassandra et Hadoop entre autres), la plateforme suédoise s’est lancée dans un nouveau grand projet : la Musical Map.

Celle-ci s’appuyerait sur la géolocalisation des utilisateurs pour agréger toutes les chansons écoutées en fonction de leur ville de résidence. Le but ici n’est pas d’en faire ressortir les titres les plus joués, ce qui reviendrait à un simple classement de tendances, et serait relativement identique d’un endroit à l’autre de la planète. Mais plutôt de mettre en lumière les différences, ces titres et genres musicaux atypiques, pour permettre aux membres de Spotify de “voyager d’une ville à l’autre, uniquement pas le biais de leurs écouteurs.” Mise à jour de façon mensuelle, cette plateforme donnerait une représentation sonore des différentes villes du monde.

Ce qui fait la force de Spotify c’est sa capacité à se renouveler, et à perfectionner ses services pour coller au plus près des attentes de ses utilisateurs. La plateforme a compris qu’il ne suffisait pas seulement de rendre la musique accessible, mais qu’il fallait également proposer une réelle expérience pour fidéliser l’utilisateur.

Au delà de l’expérience, la prédiction du succès ?

Face à la quantité de données récoltées et aux performances prédictives (à destination de leurs membres) de ces plateformes, l’industrie musicale commence à s’interroger sur leurs possibilités d’un point de vue commercial. Et si on pouvait prédire le succès d’un hit, en se sourçant directement dans le public cible ?

En 2013, Spotify avait déjà tenté l’expérience, en essayant de prédire les gagnants des Grammy Awards. En se basant sur les habitudes d’écoute de ses utilisateurs, la plateforme avait pu déterminer la popularité d’un morceau, un artiste ou un album. Sur 6 de ses prédictions, 4 s’étaient avérées exactes.

Shazam, quant à lui, est parvenu à prédire correctement 69 % des résultats soit 11 catégories sur 16, dépassant ainsi Spotify sur un éventail de catégories presque trois fois plus étendu.

Alors, réalité ou fiction ? Les robots sont désormais capables de parcourir le web à la recherche d’informations, que ce soit sur les réseaux sociaux (nombre de like par page), sur les sites de streaming, dans la presse locale avec des mots clés, mais aussi l’affluence des concerts … Toutes ces données permettent d’évaluer un morceau et d’en ressortir un ratio indiquant son taux de réussite supposé.

Les maisons de disques tendent à miser directement sur ces utilisateurs pour dénicher les futurs succès. C’est dans cette optique que Warner Music Group s’est rapproché de l’application Shazam, qui lui permettra de mesurer la fréquence à laquelle un titre est “shazamé” afin d’évaluer son potentiel succès. Par extrapolation, c’est l’analyse de l’évolution d’un titre dans les classements des utilisateurs qui permettra de déterminer ses capacité d’émergence.

L’enjeu des applications de streaming a dépassé la course au catalogue musical le plus riche ; le combat actuel n’est pas de savoir qui détient les droits Taylor Swift mais plutôt lequel sera en mesure de recommander au mieux ses utilisateurs. Désormais, il s’agit de comprendre les goûts et comportements des internautes afin de les prédire et de répondre ainsi à leurs besoins en un laps de temps le plus court possible. Le combat de la data music ne fait que commencer.

Pour toutes demandes de conseils ou d’accompagnement dans votre stratégie data marketing, n’hésitez pas à nous contacter.

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Gabriel Dabi-Schwebel

Posté par

Ingénieur de formation j’ai commencé ma carrière dans le conseil en télécom et en média. J’ai aus

Gabriel Dabi-Schwebel

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Gabriel Dabi-Schwebel

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1 Commentaire

Michel Colin dit: 31 Août 2015

Bravo pour cet article auquel il ne manque que la mention d'une société française à la pointe de l'analyse prédictive audio : https://www.perceptio-media.fr


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